« Comme Barack Obama et Donald Trump avant lui, Joe Biden hésite à partir d’Afghanistan »
2021-04-03 16:59:24
Avant de s’engager dans un retrait du pays, la priorité pour le président américain est d’obtenir un accord entre les talibans et le président afghan, de les forcer à partager le pouvoir, explique, dans chronique, Alain Frachon, éditorialiste au « Monde ».
Chronique. La guerre de vingt ans ne prendra pas fin en mai comme il était prévu. A cette date, les troupes américaines, présentes en Afghanistan depuis 2001, ne partiront pas. Joe Biden réclame un peu de temps. La situation n’est pas mûre, dit-il. L’accord négocié par son prédécesseur, Donald Trump, n’est pas suffisamment appliqué. Le Pentagone hésite. Le gouvernement de Kaboul renâcle.
Pourquoi est-ce si difficile de quitter l’Afghanistan ? Parce que ce serait reconnaître un échec ? Dans les écoles militaires, on enseignera l’intervention américaine en terre afghane comme l’exemple type de « l’opex » qui a mal tourné. Elle passera pour la mère de ces « guerres éternelles », les forever wars d’après guerre froide que les Occidentaux – mais ce fut le cas de l’URSS aussi dans les années 1980 – ne gagnent ni ne perdent tout à fait face à des adversaires locaux, militairement beaucoup plus faibles.
2001, donc. Au nom des intérêts de défense des Etats-Unis, on s’en va guerroyer contre le terrorisme islamiste dans un Afghanistan qui est en guerre sans discontinuer depuis la fin des années 1970. On ne sait pas avec qui on signera la paix dans ce pays de 22 millions d’âmes (qui en compte aujourd’hui 38 millions) ni quand on pourra déclarer « victoire » et rentrer à la maison.
2021. Le Pentagone pourrait, à juste titre, demander : pourquoi faut-il quitter l’Afghanistan ? Après tout, en Europe et en Asie, la présence continue de troupes américaines contribue aux équilibres stratégiques régionaux. Mais il y a des combats en Afghanistan et c’est le front américain qui craque. L’opinion publique aux Etats-Unis s’interroge sur la pertinence de cette guerre sans fin, jamais gagnée, toujours recommencée.